« Le Cas Richard Jewell » de Clint Eastwood avec Paul Walter Hauser , Sam Rockwell , Jon Hamm , Kathy Bates, Olivia Wilde … Sortie Cinéma le 19 Février 2020
Clint Eastwood s’est spécialisé ces derniers temps comme un « capteur » des héros américains du quotidien renvoyant par leurs histoires véridiques aux valeurs chères à l’Amérique que le réalisateur aime . En 2015 « American Sniper » brossait le portrait d’un tireur d’élite envoyé en Irak post 11 septembre . En 2016 dans « Sully » Eastwood enrôle Tom Hanks pour jouer un commandant de bord ayant sauvé , par un amerrissage sur l’Hudson , les passagers d’un avion défaillant. En 2018 avec « Le 15H17 pour Paris » réalisateur rendait hommage à de jeunes américains courageux ayant déjoué un attentat terroriste sur un train en direction de Paris . Et donc en 2020 Clint Eastwood trace ce sillon , plus en ligne directe avec « Sully » avec « Le Cas Richard Jewell » .
Richard Jewell (Paul Walter Hauser) est un américain moyen , obèse , vivant encore chez sa mère à 30 ans passés et n’ayant eu qu’un rêve dans sa vie , devenir policier . D’assistant du sheriff à garde de sécurité de campus , il fait preuve d’un zèle maladroit et d’une implication quasi-suspecte car un peu jusqu’au-boutiste . Recalé aux examens de police il est simple agent de sécurité lors des jeux olympiques d’Atlanta de 1996 . Il sympathise avec les flics en fonction et veille consciencieusement « sa zone à protéger » ! C’est par cette obsession quasi maladive de son travail de surveillance qu’il va donner l’alerte à la bombe et sauver des vies ! Mais ne trouvant pas les auteurs des attentats , le FBI et les médias vont s’acharner sur ce profil atypique . Et si Richard Jewell était le poseur de bombes et non pas le héros lanceur d’alerte ?
La réalisation classique et efficace d’Eastwood va aller crescendo et trouver son apogée dans le derniers tiers du film où l’atmosphère est haletante et apporte un coté thriller à cette chronique où l’ordinaire et l’extraordinaire se côtoient. L’exposition du « héros potentiel » est sage , linéaire et un vrai effort de documentation et d’authenticité a été fait .Ce personnage lisse peu intéressant n’entraîne pas l’empathie( ce qui a été au final son plus grand tort) mais pour autant est-il coupable car il n’est pas dans la norme ? La drame de cet américain moyen c’est de pas rentrer dans les cases . « L’american dream » ne touche pas tout le monde et lorsqu’un « vilain petit canard » se trouve devant les feux des projecteurs pour « acte de bravoure civique » , cela devient suspect . Alors la machine peut s’emballer et broyer ses « bons petits soldats » au profil suspect de « terroriste isolé ». Eastwood montre une nouvelle fois avec minutie le visage ambivalent de l’Amérique , terre de liberté mais qui peut être aussi un système confiscatoire , suspicieux , destructeur et sans pitié .
Un gros travail d’enquête , de visionnage de vidéos des interrogatoires du vrai Richard Jewell par exemple , de rencontre avec la mère (incarnée à l’écran par Katy Bates) a été réalisé par les acteurs et le réalisateur en amont pour coller au plus près à l’authenticité . Le script écrit par Billy Ray est basé sur le recoupement détaillé de 3 témoignages du « faits divers » de la journaliste Marie Brenner et des deux auteurs Kevin Saulwen et Kent Alexander.
Eastwood n’a pas raté son casting . Paul Walter Hauser , remarqué dans « Moi Tonya » en « malfrat d’occasion un peu limité » , est excellent dans ce rôle de vigile , américain moyen-moyen croyant un peu trop aux valeurs américaines. Sam Rockwell campe un avocat presque « rangé des voitures » humaniste et à contre courant du système qui va se trouver être le seul ami de Richard . Le casting est complété par Jon Hamm (« Mad Men » ) en agent du FBI un peu retord et fourbe jouant la facilité et flirtant avec le délit de faciès . Eastwood s’est fait volé dans les plumes par la presse taxant le traitement du personnage de la journaliste incarnée par Olivia Wilde de « sexiste ».
Néanmoins « Le cas Richard Jewell » confirme qu’à 89 ans , après un retour réussi en tant qu’acteur en 2019 avec « La Mule » , il n’a rien perdu de ses capacités de metteur en scène et réaffirme son côté « franc-tireur » face aux ratés possibles de la société américaine institutionnelle et médiatique.