« Vice » d’Adam Mc Kay avec Christian Bale , Amy Adams , Steve Carell , Sam Rockwell , Tyler Perry , Lisa Gay Hamilton, Jesse Plemons … Sortie Cinéma le 13 Février 2019
La société Anapurna a produit « Vice » pour un budget de 60 millions de dollars , les résultats au Box Office US ont été décevants , le film n’a pas dépassé les 47 Millions de dollars de recettes et rembourse son budget grâce à l’international ! Si les créateurs américains sont souvent les premiers à avoir un regard critique et une « réaction Cinéma » , les spectateurs , eux , parfois ne sont pas forcément prêts . En effet avec « Vice », Adam Mc Kay (The big short) ne fait pas une hagiographie mais bel et bien un biopic au vitriol de l’ancien vice président des USA sous l’ère Georges W Bush . Le jeune Dick Cheney , viré de l’université, apparaît comme un jeune « travailleur » ivrogne appartenant à la low class soumis à un ultimatum par sa femme pour enfin sortir de sa condition et de ses addictions . L’american dream (bien « insufflé » par sa femme) va se réaliser mais les marqueurs de l’adn de ce self made man vont être la manipulation, le cynisme et l’avidité . Les quelques rares aspects positifs de cette figure emblématique du parti des républicains comme l’amour de sa famille vont être mis à mal pour assurer la pérennité et la main mise sur le pouvoir.
Christian Bale a pris des dizaine de kilos , porté des prothèses , a été maquillé pour se métamorphoser physiquement en Dick Cheney ! Greg Cannom triplement oscarisé pour « Miss Doubtfire » / « Dracula » de Coppola et « Benjamin Button » était le « make-up » designer de « Vice ». De plus il en a pris aussi l’accent et le phrasé, la façon pachydermique de se mouvoir. Si la méthode de l’actor studio était incarné en leur temps par Brando ou De Niro , la filiation est assurée avec Christian Bale . L’acteur livre une performance exceptionnelle .
Amy Adams incarne elle aussi la femme de Cheney , Lynne, véritable « moteur » dans la réussite et la pugnacité de son mari. Elle a été à la fois le détonateur et l’artificier de « l’explosion » de son mari dans les hautes sphères de Washington. Elle va le soutenir de manière infaillible. L’actrice aussi a pris du poids et continue de livrer des interprétations impeccables . Steve Carrel incarne un vieux briscard de la politique cynique , Donald Rumsfeld , mentor du « rookie » Dick Cheney et compagnon de route et de manigances à la Maison blanche. Tyler Perry (souvenez vous l’avocat dans « Gone Girl ») joue Colin Powell ,un personnage resté dans l’Histoire , réfractaire à l’invasion en Irak mais au final instrumentalisé par l’administration Bush.
Adam Mc Kay (veste ocre sur la photo) a commencé comme auteur au Saturday Night life , « institution du rire » de la Tv US . Et ça se voit et ça s’entend car il signe un film sarcastique, froid et parfois drôle sur les arcanes du pouvoir et sur le parcours atypique de cet arriviste sans scrupules , véritable prédateur, stratège reptilien avec un sens aigu de l’enrichissement et des jeux de pouvoir .
Bien sûr le style du film , son montage très « cut » , enchaînant des plans très différents renvoie à un réalisateur « spécialiste » des brûlots , Oliver Stone . Mc Kay y ajoute sa patte par son côté « farce » doublement impactant car on en sourit mais on sait aussi que » ces évènements ont bien eu lieu » !
« Vice » a un côté à la fois jouissif par l’aspect effarant de ce parcours et la précision documentée apportée au propos , instructif sur le fonctionnement d’un cabinet à la maison blanche , sous présidence Bush (joué ici par Sam Rockwell fraîchement oscarisé pour « 3 Billboards Outside Ebbings, Missouri » ) et en même temps consternant & dramatique car les manigances d’un petit nombre peut amener à l’invasion d’un pays (les armes de destruction massive « inventées » en Irak) . Gorges W Bush apparaît « limité » , dépassé et ravi de déléguer une partie de ses pouvoirs au mastodonte Dick Cheney . Rétrospectivement ça fait froid dans le dos .
« Vice » a donc un double sens puisqu’il représente le raccourci pour la fonction de « Vice-président » , normalement un inaugurateur de chrysanthèmes version US mais aussi c’est l’opposé de la vertu ! En effet Dick Cheney a bien fait preuve de vice, une grande « disposition naturelle au mal avec la conduite qui en résulte » (définition générique) pour accaparer des sphères de compétences tel un « Gargantua politique jamais rassasié » fusionnant intérêts privés & décisions publiques . Christian Bale a d’ailleurs remercier Satan qui l’aurait inspiré pour incarner Dick Cheney lors des Golden Globes ! Ce titre est aussi un message pour avoir aussi une double lecture et n’apparaît pas aussi frontal que certains le disent.
Pour beaucoup « Vice » sera à découvrir en DVD/BR à sa sortie car il n’a pas non plus tenu l’affiche longtemps sur le sol français , même si le film a intrigué près de 300 000 spectateurs. Un score honorable pour un sujet très américain mais qui aurait mérité une audience plus vaste tant cette « chronique » semble aussi être un écho à peine « subliminal » à l’omnipotence Trump et à son affairisme chevillé au corps. Le film a reçut 2 Golden Globes , un Bafta (meilleur montage) et de nombreuses nominations méritées mais « non transformées » aux derniers Oscars !