« Jalouse » de David Foenkinos & Stéphane Foenkinos avec Karine Viard , Dara Tombroff ,Anne Dorval, Thibault de Montalembert ,Anaïs Demoustier, Marie Julie Baup, Corentin Fila… Sortie Cinéma le 08 novembre 2017
Nathalie (Karine Viard) quinquagénaire divorcée, professeur de Lettres dans une prépa renommée , fête l’anniversaire de sa fille âgée de 18 ans . Ce qui devait être un heureux événement va être un déclencheur compte à rebours négatif vers un dévissage psychologique et social en règle de cette amie, cette mère , cette femme ! La distanciation dédaigneuse va peu à peu se transformer en jalousie maladive, une sorte de burn-out existentiel et émotif ! La souffrance va se propager , Nathalie va devoir se reprendre en main car la dépression et la crise perdurent .
Si le personnage principal est bien Nathalie, son comportement blessant , maladroit et destructeur , ce sont aussi les retombées et les réactions des autres autour d’elles face à ces attitudes confirmant un désordre profond . Face cette folie latente se cache une femme malheureuse succombant à l’envie et au désarroi face au bonheur,à la jeunesse et à la réussite des autres ! Pour incarner ce « spécimen » de femme et éviter de la rendre détestable, il fallait une actrice « équilibriste » sur le fil du tragi-comique . Là où la tension et le malaise sont palpables , l’actrice arrive , le temps d’une mimique, d’une réflexion comique, à désamorcer pour un court instant, le tragique de la situation. Karine Viard est une nature et occupe l’espace de manière gargantuesque et talentueuse . Pour autant , grâce au travail d’écriture des frères Foenkinos , des vraies scènes de comédie allègent le propos (La séance chez le psy, le cours de Yoga…) De plus tous les personnages périphériques ou dans le premier cercle arrivent à exister . Que ce soit bien sûr, sa fille, objet de son ressentiment mais de son amour sans failles au final. Dara Tombroff incarne Mathilde avec une vraie « délicatesse » pour reprendre le titre éponyme du précédent film des deux frères ! C’est une vraie révélation, juste et touchante, cette jeune danseuse, à l’origine, montre de réelles capacité de jeu !
Le reste de la galerie de protagonistes est lui aussi convaincant : la pote confidente (Anne Dorval/Sophie) , la rivale plus jeune en termes d’enseignement (Anaïs Demoustiers/ Mélanie), la nouvelle femme de son ex mari un peu simplette mais finalement psychologue de fait ( Marie Julie Baup/ Isabelle), l’ex mari (Thibault de Montalembert, devenu populaire via la série « dix pour cent »)…
Quelques dialogues bien sentis sont clairement des clins d’œil aux travers énervants et à l’évolution actuelle de nos sociétés, à nos modes de vie « critiquables » et formatés , à nos aspirations intimes et collectives . Ces petites touches de bon sens caustique ou tendre , ces coups de « fusains verbaux » font mouche.
Florilège : « Avec les sans lactose, sans gluten, les vegans , on sait plus quoi faire à bouffer ! » / » Ma mère me manque tellement …On pense qu’ils seront là pour toujours et on est seul. » / « La cicatrisation d’une douleur passe par le corps » / « C’est le chemin qui compte , pas la destination ».
« Femme au bord du gouffre » aurait pu être le sous-titre de « Jalouse » mais même si le propos peut apparaître grave , la partition écrite par les Foenkinos et jouée avec délectation apparente par Karine Viard s’approche plus de « la mélodie du malheur mesuré « .
La petite musique des frères Foenkinos, à l’instar de « la Délicatesse » fait son oeuvre et on est séduit et divertit par ce film attachant et distrayant à l’image de son héroïne au final positive et en phase de « guérison » évitant le mièvre et le sentimentalisme ! Karine Viard devrait , sans grosse surprise , figurer, au minima, dans la « short list » des nommées dans la catégorie Meilleure actrice aux prochains césars !