« Benedetta » de Paul Verhoeven avec Virginie Efira , Charlotte Rampling, Daphné Pataka, Lambert Wilson, Olivier Rabourdin … Sortie Cinéma le Vendredi 09 Juillet 2021 Jour de sa présentation officielle au Festival de Cannes 2021
« Benedetta » est donc le dernier film de Paul Verhoeven tourné en … 2018 ! Date aussi de l’affiche initiale sciemment provoc mise en avant au Marché du Film (voir ci dessous) . Il aura fallut 3 ans pour accorder les violons entre le réalisateur et le festival de Cannes après une opération de la hanche (2019) et une pandémie internationale (2020) . Pour faire la liaison , il sera question de la peste dans le film qui se situe au XVIIème siècle où elle se propage . La jeune Benedetta rentre au couvent de Pescia encore enfant en Italie et voue une adoration à Dieu . Les parents apportent une dote puisqu’il marie leur fille à Dieu , elle même se proclame « la nouvelle épouse de Jésus » . A l’âge adulte la none a des visions récurrentes de Jésus « son amoureux » , elle est d’ailleurs tellement « habitée » par la foi qu’elle retranscrit dans son corps les stigmates du Christ et de la crucifixion, les trous béants dans les mains et les pieds , la blessure profonde au flanc témoigne sans nul doute de sa « mutation » en sainte louant la parole de Dieu !
Alors ces évènements sont ils la vraie révélation d’une croyante proche de la sainteté empreinte de « révélation » ou le simple simulacre d’une illuminée dévote manipulatrice ?
Le couvent a ses règles basées sur l’ascétisme et l’abstinence . Benedetta va enfreindre la deuxième et ne pas suivre les préceptes en vigueur « Ton pire ennemi c’est ton corps il ne faut pas te sentir trop bien » . Elle va découvrir la jouissance saphique auprès d’une autre jeune sœur arrachée des mains d’un mari violent et avec l’aide de l’ancêtre du gode michet taillé dans une statuette de la sainte vierge ! L’amour lesbien au sein d’un couvent et sa découverte marqueront ils la déchéance de cette « influenceuse » et sa voie toute tracée vers le bûcher ?
On reconnait là les thèmes chers à Verhoeven , ceux de sa jeunesse , le cul et la religion ! L’aveuglement au nom de la religion , la justification de l’abnégation « la souffrance est le seul moyen de connaître le Christ » et aussi le moyen d’acquérir le pouvoir sont eux aussi présents dans cette histoire tirée d’une histoire vraie et d’une personne ayant vraiment existé . Et donc c’est aussi le portrait d’une sœur arriviste , manipulatrice, utilisant à ses fins « la parole de Dieu » tout en étant persuadée d’avoir été touchée par la grâce et de suivre ses préceptes en « guide spirituel » .
Virginie Efira est convaincante dans le rôle titre, habitée par sa prestation tout en ne tombant pas dans le piège du surjeu ou de l’excès ! Elle apporte sa beauté à ce personnage d’illuminée lubrique pas si immaculé , désireuse de dominer ses semblables, passant de la compassion à la possession en un tour de « magie spirituelle » !
Charlotte Rampling est elle aussi vraiment excellente en mère supérieure à priori juste mais revêche et surtout à la parole libre et clairvoyante face aux stratagèmes en vigueur. Lambert Wilson en inquisiteur « investit » est lui aussi dans la justesse et la tonalité ambiante !
Alors pourquoi , à la vision de ce Verhoeven , on est un peu déçu et on reste sur sa faim ?
Le réalisateur néerlandais n’est pas réputé pour sa finesse et d’ailleurs les films qui ont fait sa gloire , les néerlandais comme les américains , sont frappés parfois de mauvais goût assumé ou d’un coté rentre-dedans salvateur . Ici , même avec quelques scènes dénudées , le film apparaît sage, appliqué, un peu académique . Il est sulfureux sur les thèmes abordés mais pas sur le terrain de la réalisation. On ne retrouve pas le côté sale présent par exemple dans le médiéval « La chair et le sang » Le film a quelques scories formelles comme par exemple certaines expressions très contemporaines sont employées dans les dialogues : « C’est une blague ! « . La petite arrive au couvent brune puis devient blonde après 18 ans de couvent .! Et parfois l’aspect « grand guignol » apparaît maladroitement et trop appuyé pour montrer le déséquilibre de la sœur adoratrice de Jésus lubrique en même temps et sa folie latente . Le film est adapté d’un livre de Judith C . Brown sur cette sœur qui a réellement existé mais parfois plus prosaïquement on pense à une autre collection avec le titre … « le christianisme pour les nuls » !
Le film est inégal et prend son temps pour réussir à nous intéresser et fonctionne en mode diesel . L’interprétation sauve le manque de souffle de l’ensemble surtout dans le préambule même si « Benedetta » nous embarque quand même au final et devient plus fluide et tenu dans sa deuxième partie .
Ce « blockbuster d’auteur » comme aime à le présenter les producteurs du film trouvera peut être son public et mérite peut être une deuxième vision « hors contexte et hors attente » , c’est le temps qui nous dira si « Benedetta » résiste à son épreuve !