« A beautiful day »/ « You were never really here » de Lynne Ramsay avec Joaquin Phoenix , Alessandro Nivola , Ekaterina Samsonov… Sortie Cinéma le 08 Novembre 2017
Joe (Joaquin Phoenix) est un tueur à gages torturé et quasi mutique. Il fait son job à l’ancienne avec un marteau et en utilisant sa force animale . Il est engagé par un sénateur pour récupérer une jeune ado enjeu pervers de « déviants » hauts placés. La violence froide va faire son oeuvre.
« A beautiful day » (Nouveau titre français ????) a fait beaucoup parlé de lui à Cannes en Mai 2017 .A l’époque le film s’appelait encore « You were never really here » et a figuré deux fois au palmarès ; Prix d’interprétation masculine pour Joaquin Phoenix et …Prix du scénario ?! Certaines décisions des différents jury sentent la compromission ou du moins peuvent susciter au minima de l’étonnement . Car ici le scénario est clairement « erratique » * à l’image de son héros et bien mince à l’opposé de l’apparence du personnage principal.
* Qui erre / Qui se trouve hors de son foyer habituel /Qui n’est pas constant/ sens figuré personne instable/ ne manifeste aucune tendance cohérente/ se dit d’un symptôme intermittent et irrégulier…
C’est un parti-pris , cette errance désabusée où un homme à l’allure claudicante trimbale sa carcasse menaçante de nuit comme de jour . Pour autant si on peut adhérer à cette ambiance « noire » , l’histoire paraît bien simple au delà de l’aspect visuel . Trois lignes peuvent résumer ce scénario plus proche du polar psychologique expérimental que de l’intrigue fouillée .
Le prix d’interprétation est lui plus recevable. Joaquin Phoenix campe un « ours christique » au regard vide et intense à la fois .Joe grogne, il est économe en mots et généreux en coups de marteaux rageurs. Son apparence physique est impressionnante. Phoenix est une masse de muscles , ravagé , névrosé , il sait faire passer par sa démarche, son allure, son phrasé minimaliste, ses yeux , le vécu de « désabusé dangereux » du personnage.
Lynne Ramsay filme avec un talent certain le pathétique du quotidien d’un paumé « armé » . la réalisatrice écossaise vient de la photographie . Certains plans sont très beaux et captent l’oppression urbaine ambiante , d’autres jouent sur la noirceur de la nuit , alternant l’utilisation de la steadycam et le côté aseptisé des caméras de surveillance. Elle construit son film en alternant les procédés. Le plus réussi est celui de l’utilisation de la musique. C’est d’autant plus vrai que sur la fiche technique du film sont associés le compositeur Joony Greenwood et le poste de « monteur musical » avec Graeme Stewart . Car ici la musique retranscrit l’état psychologique du tueur lors de ces « besognes » chargées d’adrénaline et de pulsions primaires. Le rythme est sec, saccadé , comme une respiration psychotique qui s’accélère .C’est prenant , glaçant et très réussi .
Donc « A beautiful day » n’est pas, à mes yeux, le « Taxi driver du XXI ème siècle » comme on peut le lire sur l’affiche , extrait d’une critique du Times. D’autres ont parlé de « film vertigineux » , de « sensation immersive » … « You were never really here » apparaît comme un polar expérimental arty, frontal. Il n’atteint pas les sommets escomptés et se perçoit aussi plus comme une esquisse incomplète, les mauvaises langues diront un brouillon, inégal et elliptique , un portrait minimaliste d’un personnage introverti et fiévreux s’avérant être une sorte d ‘ « hitman grunge, à la dérive et sans pitié » .