Pourquoi « Carlito’s way » / « L’Impasse » (1993) est un des meilleurs films de Brian De Palma ? |
|
|
Certains films ont clairement des qualités mais se bonifient avec le temps, le recul, au fil des visionnages et deviennent des « classics » aux yeux des amoureux du Cinéma . Je me rappelle avoir eu comme réaction à la première vision de « Carlito’s way » que c’était dommage ou dommageable que le « maître du suspense » fasse débuter son film par la fin tragique du « héros » ! En effet la scène d’ouverture est la chute au sens propre et figuré de Carlito Brigante (Al Pacino) , porto-ricain ,ex caïd de la drogue, ayant purgé 5 ans de prison et revenu en gestionnaire de boite uniquement pour financer son départ vers d’autres horizons et s’enfuir de ce monde dangereux de petites frappes et de voyous. Mais De Palma est un cinéaste hors pair et relève le défi de faire oublier que son film est un flash back, arrivant par un tour de force à faire monter la tension et le suspense .La musique de Patrick Doyle est un très bon support additionnel pour accentuer les partis pris narratif et visuels du maître De Palma (Le début/ la fusillade à la gare…).Dans sa « grammaire Cinéma » basée sur le story board et les choix techniques , la caméra n’est jamais statique, les plans et les cadrages audacieux se multiplient et sont sa « marque de fabrique » ! Il va montrer l’étendue de son talent dès cette fameuse scène d’ouverture: noir et blanc, ralentis, voix off, mouvement de caméra inversé à 360°…
|
|
|
De Palma sort, à l’époque, de 2 échecs ; sur le plan personnel, il divorce et sur sa filmo il vient d’enchaîner un « four monumental » (Budget 47 M de $/15 M $ de recettes) , fiasco artistique et commercial, « Le Bûcher des vanités »/ « The Bonfire of the vanities » (1990) au casting de stars et un accueil mitigé à l’encontre de »L’esprit de Caïn » / »Raising Caïn » (1992) passé un peu inaperçu malgré une rentabilité financière.
|
|
|
Al Pacino lui apporte le sujet , tiré de 2 livres d’un juge de la cour suprême de New York , »Carlito’sway » & »After Hours » et Martin Bregman le producteur veut reformer l’équipe de « Scarface (1983) . De Palma ne veut plus faire de films de gangsters et trouve les 2 bouquins mauvais mais voit le potentiel et l’attachement d’Al Pacino au projet. Il va demander à David Koepp, scénariste dont il a aimé le travail sur « Bad Influence » (1990) de Curtis Hanson et « La Mort vous va si bien » (1992) de Zemeckis de remanier et structurer l’histoire. De Palma le retrouvera à deux reprises avec « Mission Impossible » (1996) et « Sneak Eyes » (1998) après « L’Impasse » !
|
|
|
|
|
|
Les personnages seront donc bien « dessinés » mais surtout « nourris » et incarnés par des acteurs vraiment impliqués. Bien sûr Al Pacino campe un » ex Rotschild du business de l’héro » , à la veste noire en cuir, ton sur ton sur une chemise et une cravate noire. Vestimentairement, Carlito est en deuil de ce monde qu’il veut à tous prix quitter pour se ranger. La tentative de rédemption de cette légende va passer par des choix au final pas si judicieux. Pacino, au collier de barbe noire, ne fait pas un copié collé de Tony Montana (Scarface) et joue plus sur sa présence, ses regards , malgré quelques répliques volubiles et scènes d’action bien senties. |
|
|
|
|
|
Sean Penn est quasi méconnaissable en avocat « marron » , pote de Brigante, cocaïnomane instable, glissant irrémédiablement vers le banditisme. Son look est une « composition maison » puisque c’est lui qui est venu « présenter » son personnage « tel que » à De Palma .Sean Penn est « bluffant » en costard cravate , cheveux « permanentés » à la calvitie précoce, grosses lunettes, il a le regard « vitreux » et le sourire faussement bienveillant. Une nomination à l’oscar n’aurait pas été volée pour l’acteur, tellement il disparaît derrière cet avocat avide ,inconscient , dangereux et un brin pitoyable. John Leguizamo, incarne , lui, le fameux « Benny Blanco du Bronx », petite frappe désirant grandir sur le marché de la dope et vexé « à mort » du refus de Carlito de lui prêter attention et crédit. Même Luis Guzman (Pachanga) apporte aussi ce « plus » vraiment représentatif du Cinéma de De Palma .Penelope Ann Miller fait le job en incarnant Gail , strip-teaseuse ancienne girlfriend de Carlito, retrouvée et sincèrement aimée même si son interprétation n’est pas l’atout du film, manquant peut être de présence aussi forte à l’écran que ses partenaires masculins.
|
|
|
« Carlito’s way » est vraiment un film de De Palma , de nombreux thèmes chers au réalisateur, sont présents: la trahison, la rédemption, le sexe, les histoires d’amour compliquées , les gares… |
|
|
Pacino ajoute avec Carlito Brigante un personnage iconique à sa filmo. D’ailleurs la mythologie de l’acteur permet d’adhérer tout de suite à sa composition ; le film renvoie aussi inconsciemment au début de « Serpico » où le flic barbu, les yeux révulsés pisse le sang dans une voiture de police ! « Sorry boys, lay down, lay down… désolé les gars, je rends les armes!
|
|
|
« Carlito’s way » a été restauré en 2016 et pour ceux et celles qui voudraient replonger dans les années 70 (l’action se situe en 1975) mais surtout découvrir un personnage de gangster attachant et charismatique « orchestré » par un virtuose du rythme et de l’image, n’hésitez pas à vous plonger dans « L’impasse » , un des meilleurs films de De Palma et des plus maîtrisés à mes yeux. |
|
|
|
|
|
» L’impasse est un film méditatif sur la vie et la mort, sur la dernière opportunité qui vous est offert pour changer de vie … » Brian de Palma : Entretiens avec Samuel Blumenfeld & Laurent Vachaud » Editions Calman Levy |
|
|